4 objectifs à privilégier pour sauver les putois

Les causes du déclin de l’espèce étant multiples, la restauration des populations de putois dépend d’une action menée sur différents plans. En priorité, son statut réglementaire nécessite d’être modifié en faveur de sa protection, qui va permettre l'interdiction de son piégeage, sa prise en compte lors des procédures d’évaluation environnementale des projets d'aménagement du territoire mais aussi la mise en place de programmes de conservation. La SFEPM demande donc en priorité l’inscription du Putois sur la liste des mammifères « protégés » en France, sur le modèle d’autres pays européens tels que le Royaume-Uni, la Suisse ou encore l’Italie.

Si cette décision est prise, la SFEPM propose un plan national de conservation détaillant un ensemble de mesures cohérentes et opérationnelles qui pourront être mises en œuvre pour restaurer durablement les populations de Putois en France tout en assurant un suivi de l’état des populations sur le territoire.

 

Quatre objectifs opérationnels seront privilégiés dans le cadre de ce plan de conservation :

1 - Restaurer des habitats favorables à l’espèce et à ses proies, et rétablir des corridors de déplacement

Les efforts pour la conservation de l’espèce doivent être portés sur la disponibilité et la qualité de ses habitats. L’espèce étant ubiquiste, les moyens d’agir pour restaurer ses habitats et ceux de ses proies, indispensables à son maintien, sont divers, et bénéficieraient à un important cortège d’espèces : le Putois peut ainsi être considéré comme une espèce « parapluie » car ses besoins recouvrent ceux de nombreuses autres espèces. La priorité doit être mise sur les habitats humides et bocagers, en utilisant le Putois d’Europe comme une espèce ambassadrice de la préservation de ces milieux fragiles.

La restauration d’habitats humides et la création de zones refuges connectées entre elles sont primordiales. Des mesures de conservation simples, telles que la mise en place de tas de branches et de pierres, de bosquets et de haies, peuvent permettre au Putois et à toute la petite faune dépendant de ces milieux de réinvestir durablement le paysage agricole.

2 - Réduire les destructions liées aux activités humaines

Un effort particulier devra être fait pour diminuer les causes de mortalité anthropique, qu’elles soient directes ou indirectes. L’une des principales causes de mortalité connues, les collisions avec les véhicules, devront être traitées en priorité, sans pour autant négliger les autres causes. Cartographier les zones prioritaires où les collisions sont particulièrement nombreuses et proposer des solutions concrètes en termes d’aménagement pour diminuer les risques de collisions font partie des pistes de solutions. Le maintien de la connectivité écologique entre les habitats et l’amélioration des traversées d’infrastructures de transports (routes, autoroutes, lignes de chemin de fer, etc.) sont indispensables pour rétablir l’espèce dans un état de conservation favorable, et profiteraient là aussi à toute la petite faune. Les solutions développées pour la Loutre et le Vison d’Europe en milieux humides, telles que les banquettes en béton ou les pontons flottants, mais aussi pour la petite faune en milieu bocager sont à étudier en termes d’utilisation par le Putois.

Par ailleurs, mesurer précisément les risques liés à l’ingestion de proies contaminées par des anticoagulants ou d’autres substances toxiques à l’échelle du territoire national permettrait de mieux comprendre ces menaces. Pour diminuer ces risques, diffuser l'information sur la toxicité de certains produits auprès des usagers (particuliers et professionnels) et des enseignes les commercialisant (rodenticides par exemple), tout en valorisant des méthodes de lutte alternative, constituent des pistes de solutions.

3 - Communiquer largement sur l’espèce et la valoriser

La conservation du Putois d’Europe amène également à considérer des problématiques d’ordre social et culturel. Une stratégie de communication à large échelle visant à améliorer l’acceptation du Putois auprès du grand public, des aménageurs et gestionnaires mais aussi des chasseurs, piégeurs et agriculteurs est primordiale. La sensibilisation doit mettre en lumière les bénéfices de sa présence d’un point de vue écologique mais aussi du point de vue économique. Ainsi, valoriser l’espèce en tant qu’espèce « parapluie » dans le milieu bocager, mais aussi comme prédateur régulateur des populations de rongeurs responsables de dégâts aux cultures auprès des différents acteurs au moyen d’informations adaptées à chaque interlocuteur, est crucial. La conservation du Putois pourrait permettre d'évoluer vers une agriculture plus respectueuse de la biodiversité, qui favoriserait la présence de prédateurs naturels plutôt que l’utilisation massive de produits chimiques.

Une meilleure connaissance du Putois, de ses besoins et de ses rôles par un large public est une condition de réussite des mesures de conservation.

4 - Développer les études scientifiques et le suivi du Putois d’Europe

De par ses mœurs discrètes et ses densités relativement faibles, le Putois est une espèce particulièrement complexe à étudier. L’absence de suivis homogènes, intensifs et coordonnés ne permet pas à l’heure actuelle d’estimer l’évolution des effectifs de manière satisfaisante et suffisamment réactive. Le manque d’informations détaillées sur l’espèce constitue un frein majeur pour localiser et engager des actions de conservation efficaces, d’où des opérations d’amélioration des connaissances sur la répartition, la biologie et l’écologie de l’espèce. La mise en réseau des structures et personnes travaillant sur le Putois et les Mustélidés en général pour mettre en commun les acquis, améliorer les techniques de suivi spécifique et développer les connaissances sur l’espèce, est un préalable indispensable pour planifier sa conservation. En particulier, le couplage d’appareils photographiques automatiques à des tunnels à empreintes et/ou collecteurs de poils montrent des résultats satisfaisants en termes de détection. Mieux l’espèce sera suivie, et mieux elle pourra être protégée !

 

Putois d’Europe (A) photographié de nuit par un appareil photographique automatique (B). (© Nathalie de Lacoste & Nature en Occitanie).
Putois d’Europe (A) photographié de nuit par un appareil photographique automatique (B). (© Nathalie de Lacoste & Nature en Occitanie).

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